Saviez-vous que, selon le site internet du MIRAMAP (1), on dénombrait en France, en 2015, plus de 2000 (deux mille) « groupes en AMAP » représentant quelque 250 000 amapiens? Cela doit représenter, en tout cas, des centaines de blogs ou sites comme le nôtre…
Aujourd’hui, cela fait 105 semaines, soit deux ans (à deux jours près) que j’ai entamé mon « Tour de France des AMAP sur la Toile ». Et, par coïncidence, je me suis aperçu que la première AMAP de France avait, elle, débuté ses livraisons, il y a 18 ans: occasion en or, donc, de parler aujourd’hui de l’AMAP des Olivades. Chacun des amapiens connaît, du moins je l’espère, l’histoire de l’arrivée du mouvement des AMAP en France. Je suppose qu’elle est également connue d’un certain nombre d’autres personnes, même si elles ne sont pas amapiennes. Pour qui l’ignore, voici ce que pour ma part je crois en savoir!
AMAP des Olivades (83190 Ollioules), https://www.olivades.com/l-amap-des-olivades et https://fr-fr.facebook.com/AMAP-Les-Olivades-181203970725/ et (pour archives, jusqu’à fin 2014) http://lesolivades.over-blog.com
En 2019, les deux distributions de parts de récoltes aux amapiens ont lieu pour un groupe, le lundi, et pour un autre, le jeudi, à la ferme des Olivades de Daniel et Denise Vuillon.
Je vais commencer par une chronologie concernant le tout début des AMAP en France (fin XXe-début XXIe s.), avant d’exposer plus longuement le parcours qui a conduit la famille Vuillon à « inventer » cette association consommateur-producteur pour le maintien d’une agriculture paysanne, que nous sommes aujourd’hui un quart de million à pratiquer en France.
Pour cette chronologie, je me suis essentiellement inspiré tant de celle qu’on trouve sur le site de l’AMAP en Dracénie (Le Flayosquet, Draguignan), deuxième AMAP créée en France, que du livre de Denise Vuillon, L’histoire de la première AMAP (L’Harmattan, 2011).
* Noël 1999: à l’occasion d’une visite à leur fille Edith qui habite New-York, Daniel et Denise Vuillon découvrent le concept CSA (Community Supported Agriculture), qui existe aux Etats-Unis depuis 1986.
* En janvier 2000, ce concept est présenté par les Vuillon à la Confédération Paysanne du Var, cependant que paraît le même mois, dans une publication nommée La Gazette des jardins, un article rédigé par Daniel Vuillon espérant la naissance d’« AMA (Associations pour le Maintien de l’Agriculture) » où consommateurs et producteurs définiront de nouvelles règles les responsabilisant les uns vis-à-vis des autres.
* En 2000, la Confédération paysanne étudie le sujet lors des réunions d’une Commission « Réseau de proximité ».
* En août 2000, les Olivades reçoivent la visite de membres d’ATTAC Var Est (Draguignan ?), cependant qu’arrive à la Confédération Paysanne un courrier de l’association Alliance PEC, pour demander la liste des adhérents varois.
* Fin Septembre 2000, Daniel Vuillon est informé de l’appel à projet du Secrétariat à l’Économie Solidaire (gouvernement Jospin), où pourrait trouver place le concept envisagé, par – sauf erreur de ma part – l’association Alliance PEC (j’ai retrouvé trace d’une association « Alliance Paysans Ecologistes Consommateurs », dont le siège social se trouvait, en décembre 1997, rue de Malte, à Paris).
* En janvier 2001, les Vuillon en parlent à José Bové (qui n’était pas sans savoir ce qui se pratiquait à l’étranger, notamment au Québec), lors de la campagne électorale pour les chambres d’agriculture, suite à un grand meeting tenu à Draguignan organisé par ATTAC. Daniel Vuillon présente aussi le concept à ATTAC Aubagne.
* 1er trimestre 2001 : traduction et adaptation au contexte français, par la famille Vuillon, des documents, contrats, pratiques. qu’ils ont collecté lors de leurs voyages aux Etats-Unis et de leurs rencontre avec des CSA locales.
* 21 mars 2001, réunion déterminante, à ATTAC Aubagne, où plusieurs dizaines de personnes font part de leur souhait d’essayer la mise en pratique.
* En avril 2001, première distribution de l’AMAP des Olivades, le 17, et début de l’AMAP du Flayosquet avec les Biancchi, éleveurs de vaches laitières (si j’ai bien compris), fin avril.
* En ce début 2001, la région PACA s’intéresse au projet des AMAP et décide de le soutenir.
* Mai 2001: AG constitutive de l’association loi 1901 Alliance Provence Paysans écologistes consommateurs afin d’être éligible aux financements publics.
Deux mots maintenant sur l’histoire de la ferme des Olivades avant les AMAP. Durant les 20 ans précédant la mise en place de l’AMAP, les Vuillon ont pratiqué diverses formes de commercialisation de leur production agricole, pour maintenir l’activité de la ferme des Olivades, alors que la Mairie d’Ollioules allait jusqu’à dire, en 1988, selon ce que rapporte Denise Vuillon dans son livre: « Vous ne pouvez plus faire des cultures de plein champ aux Olivades, ça prend trop de place ».
Quelques jalons: en 1987, ils livraient, en demi-gros, aux supermarchés du coin (débouché longtemps conservé, notamment pour les salades). Parallèlement démarre l’activité de vente directe à la ferme (qui durera une dizaine d’années).
En 1993, c’est la rencontre avec Alain Ducasse, intéressé par la biodiversité et les variétés de tomates anciennes cultivées par Daniel. A partir de 1996 commence l’expédition de leurs productions de printemps et d’été vers les restaurants gastronomiques. Une Fête de la tomate aura lieu à la ferme de 1997 à 2003.
En 2000 et 2001, décision est prise de fermer de décembre à avril le point de vente (qui connaissait une forte baisse de fréquentation en hiver), entraînant le licenciement des deux salariés permanents.
Ils avaient donc tout essayé. Si je traduis: dans les magasins de grande distribution, le producteur est à leur merci pour les tarifs, et son image de paysan est utilisée au seul bénéfice du magasin! Sur les marchés, on souffre de la saisonnalité, on n’est jamais certain que le client sera présent, on peut repartir avec de la marchandise invendue après une journée de présence. La vente directe à la ferme dépend également de la saison et de la venue ou non de la clientèle, libre d’aller voir ailleurs. D’où l’utilité du contrat amapien.
Enfin, je sais que Daniel et Denise Vuillon se sont beaucoup investi pour promouvoir le concept d’AMAP après son « invention » (quelques exemples: transposition en « AMAP Poissons » au profit des pêcheurs de l’Ile d’Yeu; déplacements pour amener un regard extérieur dans de nombreuses fermes où la relation avec les consom’acteurs pouvait faire problème; « arpentage » des différentes régions françaises, voire même à l’étranger; création de CREAMAP comme outil de promotion et d’accompagnement vers le concept…). De nos jours, le mouvement AMAP continue à se développer, et s’est désormais structuré indépendamment de ses fondateurs, notamment autour des réseaux régionaux et du MIRAMAP, et de la refonte de l’actuelle Charte des AMAP qui date de 2014.
Recueillir le témoignage des Vuillon sur cette aventure de 18 ans mériterait bien, je pense, d’être le sujet d’un autre article, d’autant plus que je n’ai pas réussi à prendre le temps (comme je l’aurais bien sûr souhaité) de les contacter directement avant la rédaction et la parution de celui d’aujourd’hui. N’est-ce pas, déjà, merveilleux de penser que les « bébés » et autres jeunes enfants de la première année d’AMAP ne vont pas tarder à devenir, ou sont déjà, aujourd’hui, des citoyens électeurs?
(1) pour de plus longues listes: http://miramap.org/-Les-AMAP-.html (consulté le 01/04/2019).
Ta d loi du cine, membre de l’AMAP Réunion / Père Lachaise depuis 2010, présent sur la blogosphère depuis 2007.
Connaissant donc un peu le monde des blogs par ailleurs (et son fonctionnement en « réciprocité »), je vous demande de ne pas hésiter à « poster un commentaire » (si possible) en remerciement sous une recette ou un article qui vous a intéressé, sans oublier de mentionner le lien vers notre propre blog (éventuellement le lien de cet article-ci).